Jean Lesage (1912-) Homme politique

Il voit le jour à Montréal mais pratique le droit à Québec avant de se lancer dans l'arène politique sur la scène fédérale, en 1945. Candidat libéral élu dans la circonscription de Montmagny-L'Islet, il accède au cabinet du premier ministre Louis Saint-Laurent en 1953 comme ministre des Ressources et du Développement économique. Peu de temps après la défaite des libéraux aux mains des progressistes-conservateurs de John Diefenbaker, en 1957, il quitte Ottawa et joint les rangs du Parti libéral du Québec (PLQ) dont il devient le chef en 1958. Après 16 années dans l'opposition, les libéraux s'emparent du pouvoir en 1960. Autour de lui, Jean Lesage regroupe un groupe de ministres - Georges-Émile Lapalme, Paul Gérin-Lajoie, René Lévesque, etc. - que l'on surnomme « l'équipe du tonnerre ». Leur perception interventionniste du rôle de l'État et la série de mesures sociales et économiques qu'ils adoptent sont au coeur de la Révolution tranquille qui s'amorce. En 1962, la décision de précipiter des élections générales sur le thème de la nationalisation des compagnies d'électricité profite au premier ministre. La plupart des observateurs s'entendent pour dire qu'il remporte à cette occasion le premier débat télévisé des chefs de l'histoire au Québec qui l'oppose, le 11 novembre, à Daniel Johnson. Lesage utilise ce second mandat pour mener à terme d'autres projets ambitieux, dont la création d'un ministère de l'Éducation, la mise en place d'un Régime des rentes québécois et la formation de la Société générale de financement. La défaite de son parti en 1966, en dépit du fait qu'il récolte 47 % des votes exprimés, le relègue toutefois au rôle de chef de l'opposition. Il y reste jusqu'à son départ de la politique, en 1970. Sa place dans l'histoire du Québec demeure étroitement liée au rôle prépondérant qu'il a joué dans la Révolution tranquille.
Claude Ryan, « La première étape d'une clarification nécessaire », Le Devoir, 29 août 1969, p. 4.
«...M. Lesage a incarné l'âme de la Révolution tranquille de 1960 à 1966 et il aura été le témoin, sinon l'artisan, des années les plus fructueuses de la croissance économique du Québec. (...) Quelques jugements sévères, impitoyables même, ont accompagné les manifestations de la politique « de grandeur » de M. Lesage. (...) Personne ne pouvait cependant mettre en doute les efforts d'une grande sincérité aux fins d'asseoir l'économie du Québec et de l'orienter vers de brillantes destinées, tout en procurant au Québec les bénéfices sociaux que la gestion rationnelle de son patrimoine doit révéler. C'est ainsi que l'on pouvait écrire en octobre 1965 que nulle part on avait amorcé une révolution tranquille par autant de projets d'ordre économique, par un souci de planification aussi poussée. Il faut ajouter que ce souci s'accompagnait d'une attitude conciliante, mais ferme, d'harmonisation de la politique économique avec la politique monétaire et fiscale du gouvernement central. »
Marc-Henri Côté, « L'incarnation de la Révolution tranquille », La Presse, 29 août 1969, p. 5.
«...Plutôt que de s'accrocher à son poste, le chef de l'opposition a décidé de redevenir simple député. (...) C'est la tête haute qu'il quitte son poste de leader du parti. C'est sans doute la meilleure façon de conserver ce que son image a de plus brillant dans la politique canadienne et québécoise. À Ottawa, de 1945 à 1958, M. Lesage a laissé le souvenir d'un homme énergique et d'un politicien d'avenir. À Québec, c'est lui et son équipe qui ont mis fin au long règne de l'Union nationale. À titre de premier ministre, il a présidé à l'opération difficile de déblocage, de 1960 à 1966. C'est là un moment important dans l'histoire politique de la province; son nom y restera attaché. Mais les tensions qu'il n'a pas su surmonter dans son parti au pouvoir se sont poursuivies dans le désarroi dévastateur qui suivit la défaite de 1966. C'est ainsi que son leadership fut de plus en plus discuté. Nous avons assisté hier au dénouement de ce petit drame politique au sein du parti libéral du Québec. »
Gilles Boyer, « La démission de M. Lesage », Le Soleil, 29 août 1969, p. 4.
«...his years in office made a new Quebec. Though a more cautious pace has since become necessary, the good done by his determined leap forward will remain. There can be no going back. And Jean Lesage will always be recognized for having kept the larger vision. He never saw Quebec otherwise than as part of Canada. He was largely responsible for bringing about the increasing recognition of the rights of French Canadians in other parts of the country, for he always saw French Canadians as both French and Canadians. (...) It is the very nature of political life to be full of uncertainties, full of disappointments. Mr. Lesage may feel that his resignation leaves his career unfinished. Every man, however, is judged, in the end not by what might have been, but by what was. Jean Lesage has no reason to doubt that final judgment. It will take all difficulties and failings into full consideration. And it will find that the balance is in his favour - impressively and forever. »
« The resignation of Jean Lesage », The Gazette, 30 août 1969, p. 6.
«...Jean Lesage, as Liberal Premier of Quebec, did more than any man in history to bring his province into the modern world. He had many invaluable assistants, among both politicians and civil servants; but his was the leadership behind which they were all able to bring their talents to bear. Together they took Quebec out of one century and put it into another. (...) Mr. Lesage was defeated within himself by the political defeat. Not since the election (1966) has he been in full charge of his party or able to inspire it with the confidence for another election : some of his best people have left him, others have been planning to depose him. This is not to his dishonor. He had already given Quebec more than most men give their people. In his decision this week to retire from the leadership he gave them the final gift : the power to reorganize the Liberal Party for another surge forward. »
« Mr. Lesage opens the road », The Globe and Mail, 30 août 1969, p. 6.